Littérature et psychanalyse

Vecteur, responsable Marie-Christine Baillehache

« Ce qui parle à notre cœur-enfant est ce qu’il y a de plus profond.

J’essaie d’aller par là. J’essaie seulement. »

Christian Bobin1

C’est avec assiduité, sérieux et enthousiasme que durant l’année 2019-2020, les six membres du vecteur Psychanalyse et Littérature se sont réunis mensuellement pour approfondir et préciser la fonction de la Lettre et son pouvoir inouï de création. Les romans, les poèmes, le travail calligraphique de François Cheng et son dialogue soutenu avec Lacan ont été riches d’enseignement sur le savoir faire de cet écrivain avec le mystère du corps jouissant dont le sujet ne peut se passer pour habiter sa propre langue et lui donner vie. Plus que dans l’Autre du sens, c’est dans la motérialité de la lettre – le son, le ton, le rythme, le silence, le suspens des mots et des phrases – que F. Cheng trouve « cette ivresse de re-nommer les choses à neuf, comme au matin du monde »2.

C’est par son travail incessant de la lettre que l’écrivain s’assure de son traitement singulier de la jouissance de son objet a par le signifiant. C’est par l’introduction de l’énonciation de son propre dire dans son écriture qu’il la diversifie, l’ouvre, la fragmente et l’invente.

Durant cette année 2020-2021, notre vecteur travaillera à démontrer comment Pascal Quignard, Christian Bobin, Nathalie Sarraute, par leur écriture de la lettre qui touche au réel de leur jouissance la plus intime et la plus singulière, s’opposent radicalement à « la société des consommateurs [qui] prend son sens de ceci, qu’à ce qui en fait l’élément entre guillemets qu’on qualifie d’humain, est donné l’équivalent homogène de n’importe quel plus-de-jouir qui est le produit de notre industrie, un plus-de-jouir en toc pour tout dire. »3

Comme chaque année, le désir de savoir et le transfert à l’École de Lacan orienteront et animeront les lectures et les productions écrites de chacun.

Pour se joindre à nous : Marie-Christine Baillehache> 06 43 37 04 97. 

  1. Bobin C., Un bruit de balançoire, Paris, L’iconoclaste, 2017, p. 6.
  2. Cheng F., Le Dialogue, Desclée de Brouwer, 2002, p. 38-39.
  3. Lacan J., Séminaire XVII, L’Envers de la psychanalyse, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1991, p. 92-93.

 

Nos rencontres précédentes

La politique subversive de l’inconscient

La politique subversive de l’inconscient

Par Véronique Melul et Marie-Christine Baillehache
En 1965 dans « La science et la vérité », Lacan fait valoir que « nul langage ne saurait dire le vrai sur le vrai, puisque la vérité se fonde de ce qu’elle parle, et qu’elle n’a pas d’autres moyens pour se faire », mais il reconsidère cette définition de l’inconscient comme la vérité du sujet, la vérité qui parle et interroge le rapport entre la vérité et le savoir

Du Tweet au Trait

Du Tweet au Trait

Par Rosana Montani-Sedoud & Marie-Christine Baillehache
Dans « Intuitions milanaises » , Jacques-Alain Miller part de cette formule de Lacan extraite de son Séminaire de 1966-1967 « La logique du fantasme » : « Je ne dis pas “la politique, c’est l’inconscient” mais tout simplement “l’inconscient, c’est la politique” » .

Introduction au trait unaire de Lacan

Introduction au trait unaire de Lacan

Par Marie-Christine Baillehache
Dès les années soixante, la question essentielle qui parcourt l’enseignement de Lacan concerne le rapport entre le sujet du symbolique et le réel de la jouissance. La réponse qu’il apporte en 1959 dans Le désir et son interprétation repose sur la fonction métaphorique du Nom-du-Père permettant au sujet du symbolique de consentir à nouer sa pulsion à un signifiant particulier prélevé dans l’Autre.

L’éros de l’Ure

L’éros de l’Ure

Par Rosana Montani-Sedoud
Dans Le Dialogue, François Cheng écrit un dialogue, non pas entre deux personnages, mais entre deux langues créant une partition où alternent à parts égales les voix de « deux langues complexes […] grandes, chargées qu’elles sont d’histoire et de culture » . Son livre est un témoignage intime de l’aventure linguistique et du travail minutieux et constant de F. Cheng au cœur des deux langues chinoise et française marquées par une écriture poétique.

Sortir du confinement en risquant son énonciation

Sortir du confinement en risquant son énonciation

Par Marie-Christine Baillehache
Le surgissement imprévisible du réel sans loi de la Covid 19 est venu trouer l’Autre et a confronté chacun à un vide de sens chargé d’étrangeté angoissante. Cette contingence réelle a introduit dans la vie de chacun une rupture dans ses liens fondamentaux à l’Autre de l’articulation signifiante et à l’énigme de l’objet a cause de son désir qui rend sa parole vivante.

D’une langue à l’autre : écriture poétique de François Cheng

D’une langue à l’autre : écriture poétique de François Cheng

Par Isabela Otechar Barbosa
Dans son livre, Le dialogue, François Cheng s’intéresse à l’affect de la langue. Cet affect ne concerne pas une seule langue mais le rapport entre la langue maternelle et la langue étrangère ; dans le cas de F. Cheng, le chinois et le français. Le passage d’une langue à l’autre lui permet d’avoir un nouveau rapport au symbolique qui met en jeu la satisfaction énigmatique d’un affect.

La Lettre du DIALOGUE de François Cheng

La Lettre du DIALOGUE de François Cheng

À la toute fin de son livre Le Dialogue, F. Cheng reprend la calligraphie qu’il a crée lui-même pour accompagner le titre de son recueil et explique qu’il y a fondu dans une seule calligraphie les deux idéogrammes que sont « le chinois 汉 » et « le français 法 ». Cette opération est rendue possible du fait que les deux caractères possèdent la même clé, celle de l’eau, à savoir trois points superposés côté gauche.

“UN DISCOURS QUI SERAIT DU RÉEL”

“UN DISCOURS QUI SERAIT DU RÉEL”

Par Rosana Montani Ma lecture du chapitre « D’un discours qui serait du réel » du texte de Jacques-Alain Miller « Lire un symptôme »[i] s’est plus particulièrement intéressée au dialogue de la psychanalyse avec la philosophie sur la question de...

Littérature & psychanalyse

Littérature & psychanalyse

Consentant, dans sa cure, à se faire docile à l’énigme du silence de son analyste, elle retrouve « la spirale des mots » dans le même temps où elle empreinte la voie de son désir qui n’est pas « juste un désir du corps mais aussi un désir de vivre ». Ce nouveau rapport à sa parole où se sont introduit un silence énigmatique et un mouvement vivant – « Vous êtes silencieuse » dit-elle à son analyste, « c’est vers ce silence que je dois aller »… Par Marie-Christine Baillehache

Littérature et psychanalyse

Littérature et psychanalyse

Si confrontée à sa propre disparition d’être, N. Bouraoui met tous ses efforts à soutenir sa présence dans le symbolique en prenant appui sur les intervalles métonymique, elle se heurte à un reste de jouissance de mort inentamée à laquelle elle abandonne son corps. Son art littéraire cherche à faire avec ce reste et la maintient dans un équilibre fragile toujours menacé par une jouissance de mort. « j’ai toujours vécu dans la magie du roman, j’ai négocié avec la vie … Par Marie-Christine Baillehache.