ÉDITO JUIN 2023

PARISLEAKS JUIN 2023

Chers Membres et Abonnés,

Nous aurons prochainement l’occasion de nous réunir pour le 7ème Congrès Européen de Psychanalyse Pipol 11, organisé par l’Eurofédération de Psychanalyse, le 1 et 2 juillet prochains à Bruxelles : « Clinique et critique du patriarcat ». Un rendez-vous très attendu pour reprendre les travaux en présentiel, après plusieurs années d’activités à distance, en raison de la pandémie du Covid. Mais aussi et surtout une belle opportunité pour répondre aux discours qui se veulent accusateurs à l’égard de la Psychanalyse, voyant en elle un véhicule des idées réactionnaires. Loin de là, l’invention freudienne revisitée par Lacan est plus que jamais d’une grande actualité. Ainsi, Freud s’interrogeait déjà sur la position des sujets névrosés qui s’empêchaient d’aller au-delà du père et Lacan, avec l’introduction de la jouissance féminine, met les jalons d’un tout autre paradigme qui tient compte des femmes d’une manière inédite.

Voici l’argument préparé par Guy Poblome, Directeur de Pipol 11 :

Le retour du patriarcat

Le thème du patriarcat, s’il était devenu désuet, revient aujourd’hui en force et serait même tenu pour responsable du malaise contemporain. Il a émergé dans les studies qui nous viennent des universités américaines, les médias s’en font l’écho. Mais il s’entend aussi dans le discours des analysants. C’est à partir de cet angle clinique que nous aborderons cette question pour l’élargir aux enjeux sociétaux actuels.

Considéré comme un système social, culturel et économique, construit pour la domination et l’exploitation des femmes par les hommes, des minorités de race, de classe ou de genre, par la majorité blanche, colonialiste, bourgeoise et hétéronormée, le patriarcat rassemble contre lui les luttes féministes, les idéologies dites woke, et l’activisme de la communauté LGBTQIA+.

La psychanalyse a, depuis son invention par Freud, participé à la remise en cause de l’ordre patriarcal. Aujourd’hui, paradoxalement, elle serait accusée d’être complice de son maintien en plaçant le père au centre de la subjectivité humaine. Lacan l’avait noté en 1971 – c’est alors la seconde vague du féminisme – l’Œdipe, « soi-disant, […] instaure la primauté du père, qui serait une espèce de reflet patriarcal »[1].

La carence du père

 

[1] Poblome, G., Argument du 7ème. Congrès Européen de Psychanalyse, le 1 et 2 juillet 2023, à lire sur le site du Congrès : PIPOL – EuroFédération de Psychanalyse (europsychoanalysis.eu).

Les 18 et 19 novembre prochains auront lieu les 53èmes Journées de l’Ecole de la Cause Freudienne, sous le titre : « Interpréter, scander, ponctuer, couper ». Les inscriptions sont ouvertes dores et déjà.

 

Et maintenant, quelques nouvelles de la Commission des cartels et de nos vecteurs, avant la parenthèse estivale :

 

Commission de cartels :

Le cartel est l’organe de base de l’École, comme le souligne Lacan. C’est le cœur de son mode de travail. Ce que le cartel met en avant, c’est que pour la psychanalyse, le savoir n’est pas universel. Au contraire, tout savoir est à construire. Le produit des cartels va ainsi de l’universel au singulier.

Le 10 juin 2023, de 10h30 à 13h00, l’ACF Île-de-France et L’Envers de Paris organisent une matinée intercartels qui aura pour titre : « Ce que produit un cartel ». À cette occasion, Clotilde Leguil sera notre extime afin de discuter trois textes qui mettent en avant des produits du cartel. Cela sera aussi l’occasion de discuter du fonctionnement du cartel, et de son importance au sein de l’École de la Cause freudienne. L’évènement aura lieu au Centre Sèvres, 35 bis rue de Sèvres, 75006 Paris.

Inscription préalable : enversdeparis-cartels@causefreudienne.org

Participation de 10 euros sera demandée

On vous attend nombreux.

Rosana Montani-Sedoud, déléguée des cartels l’ACF Île-de-France

Soledad Peñafiel, déléguée des cartels l’Envers de Paris

 

Vecteur Le corps pas sans la psychanalyse.

Lors de notre dernière réunion du vecteur « Le corps, pas sans la psychanalyse », nous avons finalisé l’article « Il m’a ghosté.e » que nous voulons proposer pour publication dans la prochaine issue d’Horizon. Puis nous avons discuté sur les différents thèmes des tables rondes organisées pour la Journée de l’Envers de décembre, dans la perspective de constituer le vecteur en cartel pour la préparation d’animation des débats de cette Journée et éventuellement la rédaction d’articles à soumettre pour une édition hors-série d’Horizon.
La prochaine réunion aura lieu le Mercredi 14 Juin à 18h30 à Cachan.

Contact : corpsy@enversdeparis.org

Seminario Latino :

« [La] science physique se trouve, va se trouver ramenée à la considération du symptôme dans les faits, par la pollution de ce que du terrestre on appelle […] l’environ­nement (*) », disait déjà Lacan en 1971.

Il avait vu juste. Au XXIème siècle, il n’est pas un jour où nous ne sommes rappelés à l’état de dégradation de notre planète, où nous ne sommes appelés au réveil, à changer nos habitudes pour tenter d’y faire barrage. Nos enfants nous font aujourd’hui la leçon, ils font le compost à l’école et nous rappellent que l’huile de palme est proscrite. Fin de l’insouciance qui régnait auparavant : enfants, jeunes, artistes relayent le message, transforment leur mode de vie.

Que peut dire la psychanalyse par rapport à cette forme particulière du malaise dans la civilisation ? Comment cette angoisse se présente dans la clinique ? Ce réel nous annonce la fin, une fin. De quoi, de qui ?

Le “Seminario Latino” de l’Envers de Paris vous invite à une conversation animée par Marie-Hélène Brousse sur cette question d’actualité, à la Maison de l’Amérique latine le mercredi 28 juin à 21h. La soirée se tiendra en français et en présence.

Contact : seminario-latino-de-paris@enversdeparis.org

 

Vecteurs lectures freudiennes :

Nous suivons pas à pas la lecture du texte de Freud, « Un enfant est battu ». Alors que la personne qui bat reste la même, le fantasme s’énonce ainsi : « je suis battu par le père ». L’essentiel de ce que nous avons traduit lors de cette dernière rencontre concerne le fantasme : il n’est jamais remémoré mais construit au cours de l’analyse. Ce qui, pour Freud, est une nécessité.

 « La deuxième phase…. est la plus lourde de conséquences. Mais on peut dire d’elle en un certain sens qu’elle n’a jamais eu d’existence réelle. Elle n’est en aucun cas remémorée. Elle n’a jamais pu parvenir à la conscience. Elle est une construction de l’analyse, mais en cela pas moins une nécessité. ».  Notre prochaine lecture aura lieu le mercredi 7 juin 2023 à 21h.

Contact : lectures-freudiennes@enversdeparis.org

Vecteur Psynéma :

Voici les films qui seront projetés à la rentrée prochaine : L’inconnu du nord express (soulignez les titres ou italiques) de Hitchcock, le 14 octobre 2023, The Big Lebowski des frères Coen, le 2 décembre 2023, Zatoichi de Kitano, le 10 février 2024, Marathon Man de Schlesinger, le 30 mars 2024. .
Les projections seront suivies d’un débat avec un.e psychanalyste, au Patronage laïque Jules Valles .

Le vecteur fera une réunion de préparation le 20 juin à 21 h.

Contact : psynema@enversdeparis.org

 

Vecteur Littérature et Psychanalyse :

Dans son roman Mémoire de fille, Annie Ernaux revient sur sa première rencontre avec la sexualité. A 18 ans, alors qu’elle est monitrice dans une colonie et pour la première fois loin du regard de sa mère dont la surveillante étroite l’a tenue jusque-là « à l’écart des garçons comme du diable »[1], elle éprouve qu’« elle crève d’envie de faire l’amour mais par amour seulement. »[2] En cet été 1958, elle ignore tout de « cet acte mystérieux qui introduit au banquet de la vie […] et sur lequel pèsent l’interdit et l’effroi des conséquences »[3]. Mais, cette énigme qui la concerne au plus intime d’elle-même, elle l’attend avec un désir ardent et en dépit d’« une grande insécurité de langage et de manière. »[4]. Il lui suffira, lors d’une surprise-partie, de la rencontre contingente avec le regard intense et le désir impérieux et sans retenue du moniteur-chef pour qu’elle se fasse soumise à celui-là qui « est pour elle du côté de ceux qui dirigent. »[5] Son désir, piégé par le regard de l’Autre, s’est effacé.

« Elle a abdiqué toute volonté, elle est entièrement dans la sienne. »[6]

Le rapport sexuel qui s’en suit, son premier, la jeune femme de 18 ans le vit sans honte mais comme « seulement l’obéissance à ce qui arrive, l’absence de signification de ce qui arrive. »[7] Son désir y est réduit à la soumission à la loi phallique indiscutable et universelle où s’impose « une sauvagerie masculine qu’un jour ou l’Autre il lui aurait bien fallu subir. »[8] Fatalité du rapport sexuel qui fait croire qu’il y en a un.

Tout-au-long de son roman, A. Ernaux déplie les conséquences de cette rencontre avec la jouissance du Non-rapport-sexuel qui l’a laissée, à 18 ans, sans pensée et sans corps, sans règle et en proie aux humiliations de ses paires. Elle en décrit le parcours depuis la « fille chiffon » qui « est dans l’affolement de la perte, dans l’injustifiable de l’abandon »[9] jusqu’à sa retrouvaille avec « les bornes du corps. »[10]

C’est cette « traversée périlleuse » de la jeune femme de 18 ans qu’A. Ernaux fut et qui l’a menée 50 ans plus tard « au port de l’écriture »[11] , que notre Vecteur Psychanalyse et Littérature suivra en assistant, le Dimanche 11 Juin au théâtre du Vieux-Colombier, à l’adaptation théâtrale qu’en a fait Silvia Costa.

Contact : littérature@enversdeparis.org

 

Le Vecteur des Lectures Cliniques va commencer son troisième cycle de travail de deux ans à la rentrée 2023. Nous sommes en train d’accueillir les demandes de participation des personnes souhaitant rejoindre notre espace de réflexion clinique.

Notre travail est centré sur la psychanalyse appliquée en institution et s’adresse en priorité à des nouveaux venus, désireux d’étudier et de discuter à plusieurs les textes cliniques de S. Freud, J. Lacan, J.-A. Miller et E. Laurent pour y mettre en relief la logique et la dynamique de l’orientation lacanienne. Ce sera notre boussole pour l’élaboration des cas cliniques, présentés par les participants du Vecteur. Pour certains, ce sera l’occasion de parler de leur clinique pour la première fois publiquement.

Lors de chaque réunion deux participants vont, chacun, dire en quelques mots leur questionnement, issu de la lecture des textes de référence et susciter ainsi une discussion générale, qui va faire appel aux lectures et à l’expérience clinique de chacun (en tant que clinicien et / ou en tant qu’analysant).

Dans notre Vecteur nous poursuivons la méthode du travail mise en place par Pascale Fari: “faire cas du texte” et “élever le texte théorique à la dignité d’un cas”.

Pour que chaque participant du Vecteur puisse prendre une part active aux discussions et faire les présentations s’il le souhaite, le nombre de vectorisants est limité à une vingtaine.

Les réunions de notre Vecteur ont lieu un samedi après-midi par mois, de 15h00 à 18h00. Chacune de ces réunions est préparée par une rencontre entre le cartel d’organisation et les collègues qui vont présenter une intervention clinique ou théorique lors de la prochaine réunion.

Ce principe, qui constitue une des originalités de notre Vecteur, a montré son intérêt dans le peaufinement du travail présenté à l’ensemble du Vecteur des lectures cliniques. Comme l’a noté Pascale Fari, la fonction du cartel d’organisation est d’animer le travail du Vecteur, cerner les questions, les mettre en perspective car « mettre en relief un point vif aide à ne pas éviter le tranchant, les arêtes, le réel du texte » et du cas clinique.

Cette méthode, nous l’avons également appliquée lors de la réunion du 13 mai quand nous avons travaillé ensemble le chapitre V Tuché et automaton du séminaire des Quatre concepts fondamentaux de la psychanalyse de Jacques Lacan. Le questionnement de Cécile Boultez a souligné avec finesse l’aspect partitif de la répétition, tandis que Caroline Happiette, grâce à une vignette clinique très élégante, a mis en lumière le fait que le transfert n’est pas la répétition et que c’est la présence de l’analyste qui est la condition de l’interprétation. C’était également le fil conducteur du cas clinique présenté par Manuela Rabesahala qui a suscité une discussion très riche et animée.

Contact : clinique-lacan@enversdeparis.org

 

Le Vecteur Addictions nous informe que la prochaine Conversation du TyA aura lieu le lundi 19 juin. Marie Salaün interviendra sous le tire : Fumer pour « rentrer entre parenthèses »

À partir de la situation de Claire, nous proposons d’interroger une forme d’usage singulier du cannabis dans un cas de psychose ordinaire.

Contact : addicta.org/conversations

 

En attendant de vous retrouver dans l’un ou plusieurs de nos rendez-vous, je vous souhaite un bel été, plein de belles découvertes et de lectures inspirantes.

Dalila Arpin

Directrice de L’Envers de Paris

(*) Lacan J., « Lituraterre », Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p.18.

[1] Annie Ernaux, Mémoire de fille, Paris, Ed. Gallimard, 2016, p. 30.

[2] Ibid., p. 31.

[3] Ibid., p. 32.

[4] Ibid., p. 28.

[5] Ibid., p.45.

[6] Ibid., p. 48.

[7] Ibid., p. 50.

[8] Ibid., p. 48.

[9] Ibid., p. 55.

[10] Ibid., p. 161.

[11] Ibid., p. 158.