ÉDITO NOVEMBRE 2023
PARISLEAKS NOVEMBRE 2023
Chers Membres et Abonnés,
Dernière ligne droite avant la Journée « Les nouveaux symptômes du numérique », évènement organisé par l’Envers de Paris et l’ACF Ile-de-France, le 9 décembre prochain, au centre Sèvres, 35 bis rue de Sèvres, 75006 Paris.
Le Sommet sur la sécurité de l’intelligence artificielle, le AI Safety Summit, a eu lieu au Royaume-Uni, les 1er et 2 novembre derniers. Parmi les angoisses qui se réveillent, celle mise au premier plan, est une attaque terroriste orchestrée par ces machines. C’est dire l’importance de ces nouvelles technologies et la menace qu’elles peuvent incarner pour les États démocratiques. Des enjeux politiques, sociaux, éducatifs, économiques défient les sujets du XXIème siècle. Il revient aux psychanalystes d’interpréter ces nouveaux phénomènes :
« Qu’y renonce donc plutôt celui qui ne peut rejoindre à son horizon la subjectivité de son époque. Car, comment pourrait-il faire de son être l’axe de tant de vies, celui qui ne saurait rien de la dialectique qui l’engage avec ces vies dans un mouvement symbolique ? Qu’il connaisse bien la spire où son époque l’entraîne dans l’œuvre continuée de Babel, et qu’il sache sa fonction d’interprète dans la discorde des langages »[1].
Ni technophobes, ni technophiles, nous pouvons nous inspirer des idées du philosophe français Gilbert Simondon (1924-1989), qui prônait la considération des objets technologiques comme des précipités d’actions humaines et des concentrés de l’histoire qui les ont forgés. Ni objets asservissants, ni esclaves de l’intelligence humaine, en découle l’invitation à passer « de l’esclavage à la familiarité »[2] : « une familiarité qui fait qu’on a presque un lien d’amitié avec cette concrétisation du travail, avec cette réalité qui n’est pas un organisme, mais qui est presque un équivalent d’organisme »[3]. Mais qui est cet ami à la fois familier heimlich et à la fois étrangement inquiétant, Unheimlich, chevillé à notre corps ? La psychanalyse d’orientation lacanienne a introduit une catégorie spécifique pour cela : petit a. Il nous revient d’en assumer les conséquences.
Nous dialoguerons avec des représentants d’autres disciplines, eux aussi concernés par ces nouvelles inventions.
Vous trouverez en bas de cette page le lien vers le programme. Vous êtes invités à vous inscrire en suivant le lien indiqué ci-dessous.
Il n’y aura pas d’inscription sur place.
Avant cela, l’évènement annuel de l’École de la Cause freudienne, le 18 et 19 novembre prochain, sur un sujet cher à la Psychanalyse, « Interpréter, scander, ponctuer, couper ». Le lien pour l’inscription se trouve en bas de la page.
Réunis chez Susanne Hommel le 4 octobre, les membres du vecteur Lectures freudiennes ont commencé à examiner le ressort du fantasme de l’enfant battu : il consiste dans le rapport de haine et de mépris que l’enfant (la petite fille dans trois cas sur quatre) entretient avec un petit frère ou une petite sœur. La présence du petit dernier, auquel les parents aveuglés gardent toujours une part de tendresse, a en effet pour conséquence de faire chuter d’un seul coup (einen einzigen Schlag) l’enfant de son statut de toute-puissance imaginée, engendrant ainsi la haine et le mépris. Dans ces conditions, le fantasme (die Schlagephantasie) dit : « cet autre enfant, le père ne l’aime pas : il n’aime que moi. »
Contact : lectures-freudiennes@enversdeparis.org
Pour terminer cette année 2023 sous le signe de la tragédie, le vecteur Théâtre et psychanalyse vous invite au théâtre de l’Odéon le dimanche 3 décembre à 15h pour une représentation d’Andromaque, de Jean Racine, mise en scène par Stéphane Braunschweig, directeur du théâtre de l’Odéon. Virginie Leblanc viendra débattre avec le metteur en scène à l’issue de la représentation. Vous pouvez réserver vos places en écrivant un mail à theatreetpsychanalyse@gmail.com (prix préférentiel de 30€). Vous pourrez également lire prochainement le texte de Eva Carrere Naranjo, membre du vecteur, qui propose sur notre site une lecture lacanienne de cette fameuse tragédie.
Contact : theatre@enversdeparis.org
Poursuivant ses activités autour du thème « Institutions et savoir inconscient », le Seminario Latino propose une soirée sous le titre « Interprétation et acte dans les institutions » qui comptera avec la participation d’Éric Zuliani en tant qu’extime. Elle aura lieu à la Maison de l’Amérique Latine, le mercredi 20 décembre à 21h.
Contact : seminario-latino-de-paris@enversdeparis.org
En novembre, notre vecteur Psychanalyse et Littérature continuera de suivre pas à pas C. Laurens dans sa modalité singulière de jouir de la langue. De son propre aveu, son écriture romanesque, commencée dès les années 1990, prend sa place vitale en 1995 après la mort de son fils Philippe. « Comment en mars 1994, couchée sur mon lit en position fœtale, […], souffrant tant que j’avais l’impression d’être trouée, béante, brisée, comment la seule idée qu’à un moment j’allais me lever et m’asseoir devant une feuille de papier a-t-elle pu m’apporter l’apaisement suffisant pour traverser les heures ? » [4] C’est en prenant appui sur le mystère que demeure pour elle cet horizon de vie retrouvée qu’elle choisit d’inscrire le temps au travail dans sa pratique de la langue et trouve sa solution pour « ne pas mourir de douleur » [5]. « Langue-onguent, cérat des mots qui opérait un lent et sûr adoucissement du chagrin. Car les mots pansent : eux par quoi s’élabore la pensée – on disait autrefois le pensement – prennent soin aussi de nos blessures. » [6] Ce lien de confiance et de secours que C. Laurens établit avec sa langue écrite repose sur son consentement à accorder aux mots le temps qu’il leur faut pour trouver leurs résonnances de sens et leur poids de corps. Pour elle, l’écriture ne vaut que si elle parvient à « peser ses mots. » [7] C’est qu’ils ont « une épaisseur, une densité, une profondeur », c’est qu’ils ont « leur corps, leur chair, leur voix » [8]. Pour leur donner ce poids de vie, ce grain de voix, elle n’hésite pas à entrer « dans la mémoire la plus intime de [ses] mots » [9] en apprenant pas à pas « à déchiffrer l’obscur dans ce qui parait clair, et à entrevoir l’absence dans l’apparente stabilité d’une présence » [10].
La visée de C. Laurens d’écrire la clarté du sens et l’ombre du corps jouissant des mots résonne avec ce que Lacan nous enseigne en 1972 dans son Séminaire Encore : « Nous ne savons pas ce que c’est d’être vivant sinon seulement ceci, qu’un corps cela se jouit. Cela ne se jouit que de le corporiser de façon signifiante » [11].
Lors de notre réunion-Zoom du Lundi 13 Novembre à 20h, Valérie Chevassus-Marchionni dépliera pour nous comment C. Laurens, dans son roman Celle que vous croyez, n’a pas oublié de se souvenir qu’elle était vivante.
Notre vecteur Psychanalyse et Littérature reste ouvert à qui désire s’enseigner de l’art littéraire de C. Laurence et s’orienter de Lacan et de J.-A. Miller. Il vous suffit de contacter M.-C. Baillehache à l’adresse : littérature@enversdeparis.org.
La première réunion du nouveau groupe du vecteur des lectures cliniques a eu lieu le 14 octobre. Le thème que nous avons commencé à travailler converge avec le titre du Congrès de l’AMP « Tout le monde délire, mais chacun à sa façon (clinique différentielle des psychoses) ».
Lors de notre réunion du mois d’octobre, nous sommes d’emblée entrés dans le vif du sujet avec les discussions à partir du questionnement de Cristobal Farriol sur le texte de Sigmund Freud « La perte de la réalité dans la névrose et dans la psychose ».
Le cas clinique exposé par Isabela Mourao de Matos frappait les esprits par son actualité clinique et politique, en suscitant des échanges très vifs, subtils et enseignants et permettant de revoir l’intérêt du texte freudien à la lumière d’aujourd’hui.
Contact : clinique-lacan@enversdeparis.org
Vecteur Le corps pas sans la psychanalyse :
Après l’accueil de Martine Bottin, nouvelle venue dans notre vecteur, nous avons discuté en détail d’un cas, dans le cadre de notre thème des effets de résonance sur le corps des sons et des mots dans leur motérialité.
Il s’agissait d’un patient qui avait participé à une séance d’un groupe d’improvisation vocale, où il avait été demandé que chacun à son tour mette en sons, en paroles et en gestes un simple mot choisi par devers lui. Ce sujet, habituellement à l’aise dans ce genre d’espace de créativité, s’est ce jour- là retrouvé sans souffle et sans voix, empêtré dans ses gestes et incapable de mettre en scène le mot « amour » qu’il avait lui-même choisi. C’est après-coup seulement qu’il put mettre des mots sur ce passage à vide.
Pour la prochaine séance qui aura lieu le 23 novembre à 20h à Cachan, un participant s’est proposé de préparer une discussion sur la motérialité et le style, d’après « Lituraterre ».
Contact : corpsy@enversdeparis.org
Le vecteur Psynéma se réunit le 11 novembre à 20h afin de préparer la rencontre psychanalyse-cinéma prévu le 2 décembre au Patronage Laïque Jules Vallès à 14h, avec Romain-Pierre Renou, notre invité. Le film en question sera The Big Lebowski (1998) de Joel et Ethan Coen.
Contact : psynema@enversdeparis.org
En attendant de vous voir nombreux dans nos activités, rendez-vous en décembre, pour la dernière Paris Leaks de cette équipe.
Dalila Arpin
Directrice de l’Envers de Paris
[1] Lacan J., « Fonction et champ de la parole et du langage en psychanalyse », Écrits, Paris, Seuil, 1966, p. 321.
[2] Alombert A., Penser l’humain et la technique. Simondon et Derrida après la métaphysique, ENS Éditions, 2023, p. 299.
[3] Simondon G., Sur la technique, puf, 2014, cité par Alombert A., op. cit, p. 299.
[4] Laurens C., Quelques-uns, Paris, Gallimard, 2011, p. 14.
[5] Ibid.
[6] Ibid., p. 15.
[7] Ibid.
[8] Ibid., p. 18.
[9] Ibid., p. 19.
[10]Ibid., p. 24.
[11] Lacan J., Encore, Paris, Seuil, 1975, p. 26.