Vecteur littérature et psychanalyse

Vecteur, Responsable Marie-Christine Baillehache

Lire la littérature avec Lacan

par Marie-Christine Baillehache

Le vecteur Psychanalyse et Littérature est constitué par un groupe de personnes décidées à se laisser enseigner par la manière dont un écrivain opère pour traiter sa propre jouissance de corps afin de la nouer autrement au langage. Cerner son savoir-y-faire avec le hors-sens qui l’anime au plus intime de lui-même permet de s’orienter toujours mieux de l’enseignement de Lacan et de J.-A. Miller.

Freud et Lacan ont l’un et l’autre questionné et se sont laissé questionner par les écrivains et leurs œuvres : Jensen, Shakespeare, Beckett, Queneau, Gide, Hugo, Duras, Claudel, Joyce… Freud considérait les écrivains comme « de précieux alliés » qui « nous devancent de beaucoup […] notamment en matière de psychologie, parce qu’ils puisent là à des sources que nous n’avons pas encore explorées [1] ». De son côté, Lacan exhorte le psychanalyste à ne « pas faire le psychologue là où l’artiste lui fraie la voie [2] ». Dans leur rapport à l’art littéraire, l’un et l’autre se gardent de comprendre l’œuvre et son auteur pour en dévoiler les ressorts inconscients, mais bien au contraire libèrent-ils la psychanalyse de la psychologie en dégageant les points de structure de l’œuvre elle-même.

De septembre 2024 à juin 2025, chaque vecteurisant a donné à son travail la perspective de cette question : de quelle vérité insistante, l’art littéraire de Chantal Thomas est-elle la fiction ? L’étude de son Journal de nage [3] et de son recueil de nouvelles La vie réelle des petites filles [4] a permis de mettre en lumière la façon dont cette écrivaine construit ses différents récits avec la coupure. Avec cet exercice de la coupure, clairement référencé à Roland Barthes et sa conceptualisation de celle-ci en littérature, elle éclaire ce que Lacan nous enseigne sur l’inadéquation entre les mots et ce dont ils parlent, sur la fonction du manque lié à l’objet (a) et sur la possibilité de lier autrement le pas-de-sens [5] au langage. Le vecteur Psychanalyse et littérature entamera sa nouvelle année d’étude en septembre 2025 avec l’essai de Chantal Thomas Comment supporter sa liberté [6]. Basé sur le désir et le transfert de travail de chaque vecteurisant, il est l’occasion pour chacun de produire un texte écrit de là où il en est de son élaboration et de l’adresser à L’Envers de Paris. Il est ouvert à qui désire s’éclairer de la littérature pour mieux s’orienter de Freud, Lacan et J.-A. Miller.

Responsable du vecteur Psychanalyse et Littérature : Marie-Christine Baillehache.



[1] Freud S., Le délire et les rêves dans la Gradiva de Jensen, Paris, Gallimard, 1986, p. 141.
[2] Lacan J., « L’hommage fait à Marguerite Duras », Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 193.
[3] Thomas C., Journal de nage, Paris, Seuil, 2022.
[4] Thomas C., La vie réelle des petites filles, Paris, Gallimard, 1995.
[5] Lacan J., Le Séminaire, livre V, Les formations de l’inconscient, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1998, p. 101.
[6] Thomas C., Comment supporter sa liberté, Paris, Rivages, 2000.


Pour se joindre à nous : Marie-Christine Baillehache> 06 43 37 04 97.

Nos rencontres précédentes

Le plaisir et la jouissance du texte selon R. Barthes

Dans son carnet de notes préparatoires à son séminaire à l’École Pratique des Hautes Études de 1973, R. Barthes rappelle que la littérature n’est pas un simple divertissement, mais qu’elle trouve son fondement dans une jouissance qui ne peut ni se dire, ni s’écrire…

Chantal Thomas : du sens à la résonnance

par Marie-Christine Baillehache

Chantal Thomas : du sens à la résonnance
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Zazie, un plus de vie !

Zazie, un plus de vie !

Par Gabrielle Vivier
Lacan s’appuie sur la linguistique saussurienne moderne qui a démontré qu’un signifiant, S1, ne peut se soutenir que du renvoi à un autre signifiant, S2. Il met en évidence que cette structure différentielle, qu’il nommera le grand Autre, préexiste au sujet et le détermine.