Littérature et psychanalyse

Notre Vecteur littérature et psychanalyse poursuivra sa recherche sur l’écriture de N. Bouraoui dans Mes mauvaises pensées pour déplier comment elle cerne d’un bord ce Trou. Nos références seront le texte de J-A Miller Le corps parlant (Scilicet, X° Congrès de l’AMP, 2016, p. 21-34) et L’os d’une cure (Ed. Navarin, 2018).Nous nous réunirons le Mardi 3 Décembre. Nous poursuivrons notre recherche sur l’écriture de N. Bouraoui dans Mes mauvaises pensées pour déplier comment elle cerne d’un bord ce Trou. Nos références seront le texte de J-A Miller Le corps parlant (Scilicet, X° Congrès de l’AMP, 2016, p. 21-34) et L’os d’une cure(Ed. Navarin, 2018). Nous nous réunirons le Mardi 3 Décembre 2019.

Si confrontée à sa propre disparition d’être, N. Bouraoui met tous ses efforts à soutenir sa présence dans le symbolique en prenant appui sur les intervalles métonymique, elle se heurte à un reste de jouissance de mort inentamée à laquelle elle abandonne son corps. Son art littéraire cherche à faire avec ce reste et la maintient dans un équilibre fragile toujours menacé par une jouissance de mort. « j’ai toujours vécu dans la magie du roman, j’ai négocié avec la vie [..], et aussi avec la mort. Mes livres sont des paravents ». (1) Par son usage dans son écriture du déplacement métonymique où se loge son être et de la coupure signifiante où se mobilise l’objet (a) cause de son désir, elle voile et révèle, pare, au réel de sa jouissance mortelle à s’effacer derrière un « corps envahissant ».(2)

Le ravissement du corps.

Ce corps envahissant le désir de l’Autre, N. Bouraoui le situe dans son lien d’amour à sa mère. « Ma peur est la peur du lien avec ma mère, ma peur est la peur de cet amour, ma peur est la peur de ma mère qui ne sait pas  séparer son corps de mon corps ».(3) Cet amour maternel dont le trop alarme est la « forteresse » dont il lui faut « trouver la sortie »(4) pour que son corps cesse de lui être ravi.

« Il y a dans l’amour une déconnexion de soi, je me suis toujours fondue au corps de l’autre, il y a toujours cette forme d’évanouissement ».(5) Au-delà du désir de la mère, il y a une jouissance non limitée qui relève de l’irreprésentable de la jouissance féminine. Cette absence de limite, N. Bouraoui l’entrevoie le jour où, enfant, elle entend sa mère dire à son propre père qui vient d’humilier son mari par une injure raciste : « Pas devant mes filles. Tu peux tout me faire, mais pas devant mes filles. »(6) Ces mots « Tu peux tout me faire » la frappent par ce qu’ils révèlent du sans limite des concessions que sa mère est prête à faire pour son propre père. Prise dans cette Autre jouissance de sa mère que la fonction paternelle ne limite pas, elle se voie dépossédée de sa place dans l’Autre symbolique du désir et réduite à son corps. Sa mère « s’avère être une ravisseuse de corps »(7) qui fait dire à N. Bouraoui-enfant : « mon angoisse est là. Après (les dits de sa mère) j’ai conscience de ma nudité […] j’ai un corps envahissant »(8) de qui s’évanouit, se ravit, dans cette jouissance non limité par la fonction phallique, c’est le voile imaginaire phallique. Le corps devient trop réel et touche à l’être. « cette impression de manquer de moi-même, de ne pas faire le tour de ce que je suis ».(9) Son sentiment d’impuissance qui englouti son être en présence « de cette totalité sous la forme du corps maternel [dont elle] doit constater qu’elle ne lui obéit pas »(10)la renvoie au ravage du « ravissement »(11) de son corps par sa mère dont l’amour insatiable écrase le désir. Au-delà du manque qui caractérise le désir et l’ordre symbolique, N. Bouraoui se confronte au « trou béant de la tête de Méduse ».(12) Marie-Christine Baillehache

 Contacter : Mme Marie-Christine Baillehache, 0642233702 .


(1) Bouraoui N., Mes mauvaises pensées, 2005, Ed. Stock, p. 55.

(2) Ibid., p. 19.

(3) Ibid., p. 50.

(4) Ibid.,114-115.

(5) Ibid., p. 50.

(6) Ibid., p. 19.

(7) Brousse M.H., Une difficulté dans lanalyse des femmes : le ravage du rapport à la mère, Ornicar ? N° 50, 2002, p. 102

(8) Bouraoui N., Op. cit., p. 19.

(09) Ibid., p. 159.

(10) Lacan J., Le Séminaire livre IV, La relation dobjet, 1956-1957, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil, 1994, p. 185.

(11) Brousse M.H., Une difficulté dans lanalyse des femmes , Op. cit., p. 104.

(12) Lacan J., Op. cit., p. 195.