La Mouette de Tchekhov

La Mouette de Tchekhov

par Olivia Bellanco

Une femme, deux hommes. Voilà, la géométrie des intrigues qui s’enchevêtrent et se répondent dans la pièce La mouette d’Anton Tchekhov, mise en scène actuellement par Stéphane Braunschweig au théâtre de l’Odéon, traduction de André Markowicz et Françoise Morvan. De nombreux thèmes y sont abordés tous aussi précis que riches. Malgré leur diversité, ils se rejoignent en ceci qu’ils concernent tous la question de l’existence et de son sens. L’apparente simplicité des scènes laisse apparaître peu à peu l’épaisseur qu’elles recèlent, à savoir la question de la réalité mortelle pour l’être humain.

Confrontés à l’énigme de la vie, les personnages n’ont de recours que langagier. Ils parlent ou écrivent. Tréplev, jeune auteur en devenir, cherche ainsi dans et par sa propre écriture, une signification à la vie, à sa vie. Mais celle-ci n’advient jamais. Face au trou, la vacuité de son existence s’installe et la mort rôde. Il tue par désespoir, ou résignation, une mouette qu’il dépose aux pieds de Nina, sa bien-aimée.

Pour Nina, c’est l’écriture de l’Autre qui devient sa vie ; elle s’en fait même la porte-parole dans son métier d’actrice. Une phrase de l’Autre, d’apparence anodine, prononcée au moment où elle est assise près du cadavre de la mouette va la percuter et tracer le chemin de sa destinée. En effet, Trigorine, un écrivain de renom qu’elle admire, passe et voit la scène énigmatique d’une jeune fille auprès d’une mouette morte. Il résout le hors-sens de la scène en livrant une fiction qu’il imagine : un homme « prend la vie » de la fille libre, libre comme une mouette. Nina y répond en écho en prélevant dans un livre de Trigorine cette phrase : « Si jamais tu as besoin de ma vie, viens et prends-la. » On comprendra dans la pièce que Nina n’est en fait qu’écho. Elle est en effet, absorbée, aspirée par les mots de l’Autre, par l’écriture des autres, et ne parle qu’en s’étayant de citations, de répliques apprises dans son métier. C’est son rapport au langage.

Nina se retrouve ainsi épinglée à cette « phrase marquante » dont elle deviendra l’étendard. Inéluctablement, elle devient cette mouette et Trigorine lui prend sa vie en la séduisant puis en la rejetant après le décès de l’enfant qu’ils ont eu ensemble. Comme un oiseau en cage, Nina est enfermée dans les mots de l’Autre dans lesquels s’écrivent son histoire. Elle n’a pas la possibilité d’un recours fantasmatique pour y parer.

Les hommes, les deux hommes sont faibles, défaillants à la manière du déclin du Père qui est en marche dans une Russie où l’époque et les mœurs évoluent. Les repères changent et le sujet s’en retrouve déboussolé [1], sans réponse à l’énigme de la vie et de la mort. Chaque personnage témoigne, à sa façon, de sa propre question instante et incessante qui fait retour sans possibilité d’une adresse. Néanmoins les mots restent, et c’est avec eux que les personnages du théâtre de Tchekhov tentent de se maintenir vivants.

C’est à partir de leur propre rapport au langage, c’est-à-dire de la façon dont le signifiant les a percutés et a pris corps pour eux que chaque personnage joue sa partie. Par les mots, ils se défendent de la mort, en essayant de trouver un sens à la vie, parfois au risque de s’y perdre et de se précipiter vers un destin funeste. Le langage est ainsi leur pharmakon, remède et poison [2] à la fois. Il est pour ainsi dire le personnage à part entière de chaque pièce de Tchekhov qui en montre les versions infinies au travers de chaque personnage.

Mais curieusement et c’est ça toute la poésie de Tchekhov, c’est un animal, la mouette, un être sans parole qui donne le titre à la pièce. D’une certaine manière, la mouette lie ici les personnages entre eux, précisément dans l’indicible, dans ce qui ne se dit pas mais que Tchekhov tente de cerner ou tout du moins d’aborder. L’oiseau est celui qui a une vue d’ensemble, plus exactement sur le lac, autre élément important de la pièce. Le lac est ce creux, ce creux au centre de nous-mêmes, au cœur de la forêt de signifiants qui nous habitent et que nous habitons.

Dans la mise en scène que Stéphane Braunschweig propose actuellement au théâtre de l’Odéon, il en fait justement un lac asséché. Il a décidé d’aborder pour cette création, sa scénographie au travers de celle de Tréplev qui ouvre le premier acte par la représentation de sa pièce. Celle-ci sera arrêtée, avortée, ne trouvant pas de fin et restant en somme, un commencement. Mais c’est un commencement qui débute par la fin en ceci qu’est relaté un monde post-apocalyptique, une fin du monde, où il n’y a plus rien de vivant, que du « vide, vide, vide », l’effroi et « l’horreur », d’après la tirade prononcée par Nina. Il y a une pièce dans la pièce mais aussi avec ce que propose S. Braunschweig une scénographie dans la scénographie laissant apparaître l’entrelacement des différentes dimensions que La mouette, aussi libre soit-elle, charrie malgré elle.

Le 15 décembre, le vecteur théâtre et psychanalyse de l’Envers de Paris vous invite vous aussi à devenir des spectateurs de « la scène de la scène de la scène » et à écouter ce que S. Braunschweig pourra nous en livrer lors de la discussion qui suivra, avec Bénédicte Jullien, psychanalyste membre de l’ECF, animée par Hélène de la Bouillerie. Mais attendez-vous néanmoins à ce qu’une mouette, une femme et deux hommes qui arrachent la vie parfois à mort, par les mots, vous bousculent plus que ce que vous ne pouvez le croire !


[1] Cf. Miller J.-A., « Sortir du père », vidéo YouTube sur Miller. tv où il parle de la « boussole » perdue à l’époque du déclin du Père.
[2] Cf. Pfauwadel A., « Il n’y a pas de normes sociales. Il n’y a que des normes sexuelles. Lacan, réponse à Foucault », https://journals.openedition.org/gss/5489#bodyftn1

Édito avril 2025

Édito février 2025

« La rêverie, si on prend les choses par la rêverie fantasmatique, ça fait tout de suite valoir les deux aspects, deux registres du fantasme. D’abord, je dirais, une fonction imaginaire – ne serait-ce que parce que le fantasme comporte apparemment, des formes, des personnages, une scène, et comme un petit roman […] À côté de cette dimension imaginaire, qui paraîtra aussi de premier plan, il y a une dimension symbolique du fantasme […] on peut même poser […] qu’une phrase en est le support, et même le résumé, ou même que, le fantasme, c’est une phrase, c’est la phrase « Un enfant est battu ». Et, je dirais que ces deux aspects du fantasme […] sont ceux que Lacan a présentés d’abord […] c’est-à-dire qu’il lui a paru d’abord, qu’il était toujours, dans le fantasme, question de corps…

read more

Édito janvier 2025

Avec le bureau je tiens à vous présenter, nos meilleurs vœux pour cette nouvelle année. Qu’elle soit une année pleine de rencontres, d’activités et de surprises, pour tout un chacun. Notre association repart, après la pause de fin d’année, chargée de nouvelles énergies et pleine de projets intéressants. Nous continuons à travailler sur le thème Fantasmes contemporains du corps, à interroger avec ce prisme de lecture, l’actualité, le cinéma, le théâtre, la littérature, la clinique et à tisser les connexions entre la psychanalyse et la cité, selon la vocation de L’Envers de Paris.

read more

Édito janvier 2025

Avec le bureau je tiens à vous présenter, nos meilleurs vœux pour cette nouvelle année. Qu’elle soit une année pleine de rencontres, d’activités et de surprises, pour tout un chacun. Notre association repart, après la pause de fin d’année, chargée de nouvelles énergies et pleine de projets intéressants. Nous continuons à travailler sur le thème Fantasmes contemporains du corps, à interroger avec ce prisme de lecture, l’actualité, le cinéma, le théâtre, la littérature, la clinique et à tisser les connexions entre la psychanalyse et la cité, selon la vocation de L’Envers de Paris.

read more

ÉDITO DÉCEMBRE 2024

Les 54es journées de l’École de Cause freudienne se sont terminées depuis peu avec succès et leur richesse clinique et théorique est maintenue vivante afin de poursuivre la réflexion et l’étude de la psychanalyse au sein de notre association.

read more

ÉDITO NOVEMBRE 2024

Le mois de novembre est très important pour notre École, car nous nous retrouverons au Palais des Congrès de Paris, finalement en présence après plusieurs années, pour participer aux 54es Journées d’étude de l’École de la Cause freudienne. Le thème de ces Journées, Phrases marquantes, a su capter, ces derniers mois, l’intérêt de beaucoup de personnes, car il s’agit d’un thème qui nous concerne tous. Il touche un point intime de l’histoire de chacun, là où une phrase, une expression, prononcée, adressée, lue, entendue ou attendue, a touché et marqué le sujet d’une manière particulière et indélébile. Pour cette raison ces 54es Journées de l’ECF ne sont pas réservées qu’aux professionnels, mais à tous ceux qui ont fait l’expérience de comment une phrase peut frapper, caresser, blesser, faire rêver, toucher des cordes sensibles et laisser des traces de jouissance dans le corps.

read more

Édito avril 2025

Édito février 2025

Cinzia Crosali,
directrice de l’EdP

Chers membres et amis de L’Envers de Paris,

L’argument des prochaines Journées de l’ECF, transmis par la Directrice Laura Sokolowsky, est désormais disponible : www.causefreudienne.org

Ce document offre un éclairage précieux sur cet événement majeur qui se déroulera, le 15 et 16 novembre prochains, aux Palais des Congrès de Paris, sous le titre Le Comique dans la clinique. Ce thème n’intéresse pas seulement les psychanalystes, il invite également tous les acteurs du champ culturel et social à participer aux Journées 55. Les interlocuteurs habituels de L’Envers de Paris y sont ainsi conviés : artistes, enseignants, éducateurs, chercheurs, ainsi que des professionnels du théâtre et du cinéma, des arts figuratives, de la musique, de la littérature… Nous suivrons avec grand intérêt la préparation à ces J 55, ainsi que les débats et les travaux, qui seront produits dans les mois à venir.

CONGRÈS

Édito février 2025

Le prochain Congrès de l’EuroFédération de Psychanalyse, PIPOL 12 se tiendra les 12 et 13 juillet 2025 à Bruxelles, sous le titre : Malaise dans la Famille. 

Lire l’argument pour en savoir plus : www.europsychoanalysis.eu

Nous vous invitons à participer nombreux à ces événements.

La recherche autour de Fantasmes contemporains du corps, continue de guider notre travail à L’Envers de Paris. Comment articuler les fantasmes (au pluriel) avec le fantasme fondamental, sachant que les premiers relèvent des rêveries tandis que le second est inconscient ? Dans son cours du 3 novembre 1982, Jacques-Alain Miller établit un lien pertinent entre les fantasmes et les rêveries du sujet, il dit que de : « cette rêverie consolante du sujet […] on pourrait dire […] que le fantasme console le sujet de son symptôme – qui n’est pas bien sûr de l’aspect le plus fondamental du fantasme – mais évidemment Freud a toujours maintenu la continuité, entre cette fantasmagorie consciente et le fantasme comme inconscient 1 ». Dès lors, en quoi les fantasmes contemporains du corps apportent-ils aujourd’hui une forme de consolation aux sujets ? Et de quels symptômes les consolent-ils ? C’est ce que nous nous efforcerons d’éclaircir cette année, à travers les cartels, les vecteurs et les groupes de travail de notre association.  

1.Miller J.-A., « L’orientation lacanienne. Du symptôme au fantasme, et retour », enseignement prononcé dans le cadre du département de psychanalyse de l’université Paris 8, leçon du 3 novembre 1982, inédit. 

Édito février 2025

Plusieurs événements nous attendent en ce mois d’avril, que nous découvrons dans les programmes des vecteurs, suite à l’annonce de Stéphanie Lavigne, déléguée aux cartels pour L’Envers de Paris :

CARTELS

Édito février 2025

L’activité des cartels est d’autant plus active en ce mois d’avril autour de deux événements. D’une part, la parution récente du Séminaire, livre XII, Problèmes cruciaux, de Jacques Lacan, suscite un désir de faire cartel. Vous trouverez sur le site de L’Envers de Paris une offre pour faire cartel autour de ce Séminaire : https://enversdeparis.org/cartels/. D’autre part, l’argument des prochaines Journées de l’ECF, Le Comique dans la clinique, est désormais dans toutes nos boîtes mail. N’hésitez plus à vous rassembler en cartel sur ce thème, théorique et/ou clinique, le comique et la psychanalyse étant parfois des partenaires essentiels.

Stéphanie Lavigne, Contact Paris cartels

Édito février 2025

Suivons maintenant les informations sur l’activité des cartels et des vecteurs de l’EdP

Vecteur Lectures freudiennes

Édito février 2025

Nous continuons de lire et traduire l’article que Freud écrit en 1919 : « Ein Kind wird geschlagen – Un enfant est battu », dans ce paragraphe Freud articule pas à pas le fantasme d’être battu, ses protagonistes et les différentes phases de la position féminine. 

« Si le montage ludique de la scène masochiste se tient à la fiction d’un petit garçon désobéissant, d’un page, ou d’un apprenti, qui doit être puni. Mais les personnes qui infligent des corrections dans les fantasmes comme dans les mises en scène sont à chaque fois des femmes. C’est assez déroutant ; on voudrait aussi savoir, si le masochisme du fantasme infantile d’être battu repose déjà sur une telle position féminine […] Le fantasme connu et conscient : je suis battu par la mère, est à la place de la troisième phase chez la fille, dans laquelle, comme mentionné, des petits garçons inconnus sont les objets battus ».

Nous nous retrouverons chez Susanne Hommel, le jeudi 3 avril à 21h, 

Contact lectures-freudiennes@enversdeparis.org

Seminario Latino

Édito février 2025

En avril, le Seminario Latino de L’Envers de Paris poursuit l’investigation de son thème d’étude, « Signifiants dans l’air du temps » et prépare sa prochaine soirée prévue pour le mois de juin autour du harcèlement. Plus de renseignements à venir. 

Responsables : Flavia Hofstetter et Nayahra Reis

Contact : seminario-latino-de-paris@enversdeparis.org

Vous pouvez consulter l’argument du cycle d’étude 2024-2025 du Seminario Latino de Paris sur : enversdeparis.org/seminario-latino-de-paris

Vecteur Lectures cliniques

Édito février 2025

La seconde année du cycle 2023-2025 sur « La clinique différentielle » s’est ouverte en octobre pour une année scolaire. Durant cette période, le vecteur se réunira cinq fois, chaque fois en présence d’un invité comme extime. Il a déjà reçu Adela Bande-Alcantud, Ricardo Schabelman et Ariane Chottin. Au mois d’avril, il recevra Cinzia Crosali. Il est l’occasion de prendre la parole, de présenter un exposé et d’en débattre à plusieurs. Pour que chacun puisse présenter son travail, le nombre de participants est limité. La commission d’organisation du vecteur est composée de : Andréa Castillo, Noa Farchi, Caroline Happiette, Pauline Préau et Sophie Ronsin.

Responsables : Caroline Happiette et Sophie Ronsin 

Contact : vlc.enversdeparis@gmail.com

Vecteur Psychanalyse et littérature

Édito février 2025

Après avoir analysé la conception de la coupure et de son usage dans l’écriture littéraire selon Roland Barthes telle qu’il l’expose dans Le Plaisir du texte1, et dans S/Z 2, nous avons mis en évidence comment Chantal Thomas fait usage de cette coupure pour structurer sa propre écriture. Quatre nouvelles tirées du recueil de C. Thomas, La Vie réelle des petites filles nous ont permis de démontrer l’effet de bord de la coupure délimitant un récit raisonnable et un récit subversif. Dans De l’huitre, C. Thomas place sa coupure entre le plaisir de la raison assumé par le père et la jouissance de déraisonner sur l’intelligence des huitres de sa fille. Dans La fessée inachevée, sa coupure passe entre la jouissance du corps produisant une poésie inspirée et son absence. Dans Une mère oublieuse, seule une métaphore parvient à couper le lien délétère d’une fille à sa mère. Dans Butterfly 3, le plaisir du maître de contrôler son objet de satisfaction est radicalement coupé par la jouissance infinie du rêve. Pour approfondir ce qui est mis en jeu par ce vide opéré par la coupure qui sépare deux récits, deux modalités de jouissance et a un effet de nouveauté, nous travaillerons les chapitres XXI, XXII et XXIII du SéminaireVILe Désir et son interprétation 4, dans lesquels Lacan nous enseigne la structure de la coupure. Ce va et vient dialectique entre Barthes et Lacan, entre la littérature et la psychanalyse, nous permettra d’éclairer, de préciser et d’illustrer ce que le travail de sublimation littéraire doit à la coupure telle que Lacan la conceptualise.

Notre prochaine réunion aura lieu par Zoom, le 17 avril à 20h.

Pour se joindre à notre recherche sur la voie que la littérature nous ouvre vers la psychanalyse, il vous suffit de contacter M-C Baillehache : littérature@enversdeparis.org


1.Barthes R., Le Plaisir du texte, Paris, Seuil, 1975.
2. Barthes R., S/Z, Paris, Seuil, 1970.
3. Thomas C., La Vie réelle des petites filles, Paris, Gallimard, 1995.
4. Lacan J., Le Séminaire, livre VI, Le Désir et son interprétation, texte établi par J.-A. Miller, Paris, La Martinière/Le Champ freudien, 2013. 

Vecteur Le corps, pas sans la psychanalyse

Édito février 2025

Lors de notre réunion de mars, nous avons préparé notre deuxième rencontre avec Julien Fournié, créateur de mode, qui aura lieu dans son atelier, en avril, à son invitation. Nous avons relu et discuté collectivement le texte produit par Ana Dussert sur ce travail en cours au sein du vecteur et nous avons commencé à lister des questions que nous voulons adresser à Julien Fournié en vue de notre prochaine discussion.

Prochaine rencontre : le 8 avril.

Membres du vecteur : Geneviève Mordant, Pierre-Yves Turpin, Guido Reyna, Martine Bottin, Isabelle Lebihan, Marie Faucher-Desjardins, Elisabetta Milan Fournier, Ana Dussert, Baptiste Jacomino (coordinateur).

Responsable : Baptiste Jacomino
Contact : corpsy@enversdeparis.org

Vecteur Psynéma

Édito février 2025

La prochaine projection suivie d’un débat organisé par le vecteur Psynéma aura lieu, le jeudi 27 mars 2025 à 20h00, au cinéma Les 7 Parnassiens (Paris 14e – métro Vavin).

En hommage au grand cinéaste David Lynch récemment disparu, nous avons choisi de vous présenter LOST HIGHWAY (1997) qui fait écho au thème, Fantasmes contemporains du corps, de la prochaine Journée de L’Envers de Paris et de l’ACF-IdF. Dans ce film, structuré comme une bande de Moebius où imaginaire et réel se rejoignent, D. Lynch décline ses thèmes favoris, axés, outre l’objet regard, sur l’objet voix qui est au cœur de son œuvre.

Nous reprendrons ces différents points lors de notre réunion de travail fixée le mercredi 26 février à 20h30..

Contact : vecteur.psynema@gmail.com

Responsables du vecteur : Marie Majour et Leïla Touati.

La prochaine projection organisée par le vecteur Psynéma, suivie d’un débat avec les spectateurs, aura lieu le samedi 5 avril 2025 à 14h00, au Patronage Laïque Jules Vallès (72 av. Felix Faure, Paris 15e).

Il s’agit du film REFLETS DANS UN ŒIL D’OR de John Huston, sorti en 1967.

John Huston est ce cinéaste américain majeur à la fois grand aventurier (avec la réalisation de films épiques tels que African Queen ou Moby Dick) et passionné de littérature jusqu’à clore son œuvre par l’adaptation magistrale d’une nouvelle de Joyce dans son film Les Gens de Dublin. 

Dans REFLETS DANS UN ŒIL D’OR, adaptation du roman éponyme de l’écrivaine Carson McCullers, Huston situe le récit dans un fort militaire en Géorgie où le major Penderton (interprété par le sublime Marlon Brando) enseigne l’art de la guerre à de jeunes soldats. Tout en étant lui-même démuni dans sa relation avec sa femme adultère (Elizabeth Taylor) et agité par son homosexualité latente, complètement médusé qu’il est par un de ses élèves. L’intensité des regards qui se croisent et des mouvements silencieux qu’ils motivent, nous permettront d’illustrer cet objet : le regard, cause du désir « par excellence » nous dit Lacan, mais toujours énigmatique pour le sujet.

Événement gratuit sur réservation : www.patronagelaique.eu

Notre programmation 2025 en partenariat avec le cinéma Les 7 Parnassiens est en ligne avec les liens pour l’achat d’un billet : www.multicine.fr

La prochaine réunion de travail, consacrée à ce film, avec les membres de notre vecteur aura lieu le 26 mars à 20h (à Montparnasse). 

Nous contacter à : vecteur.psynema@gmail.com

Responsables : Leila Touati et Marie Majour.

Vecteur Théâtre

Édito février 2025

La prochaine rencontre du vecteur Théâtre et psychanalyse aura lieu dimanche 13 avril à 15h, aux ateliers Berthier de l’Odéon, autour de L’amante anglaise, de Marguerite Duras. Francesca Biagi Chai a accepté notre invitation à venir débattre avec la metteuse en scène, Emilie Charriot, et c’est Eva Carrere Naranjo qui animera la rencontre.

Vous pouvez encore réserver vos places en envoyant un mail à l’adresse : theatreetpsychanalyse@gmail.com

Vous pouvez également réserver dans vos agendas le vendredi 16 mai à 20h. Le vecteur Théâtre vous proposera une rencontre autour du spectacle Léviathan, mis en scène par Lorraine de Sagazan et écrit par Guillaume Poix.

Vecteur Clinique et addictions

Édito février 2025

Cristóbal Farriol interviendra sous le titre : « Pas grand-chose à dire ».

« Si la drogue permet de rompre le mariage avec le “petit pipi”, peut-elle, par conséquent, rompre le mariage avec le langage ? C’est ce qui semble se jouer dans le cas que nous étudierons. Lorsque, pour quelqu’un, la parole ne peut rien instituer, ce serait alors à l’institution d’en faire l’orthopédie 1 ».

Renseignements et inscriptions sur : addicta.org


1. J., Journées des cartels de l’École freudienne de Paris. Maison de la chimie, ParisLettre de l’École freudienne, n18, 1976, p. 263-270.

REVUE HORIZON

Édito février 2025

Le dernier numéro de notre bulletin, Horizon 69, est disponible à la librairie de l’ECF.

Pour l’achat on-line : www.ecf-echoppe.com

Édito février 2025

Je souhaite à tous les membres et aux amis de L’Envers de Paris, de belles vacances de printemps et un joyeux week-end de Pâques.

Cinzia Crosali,

directrice de L’Envers de Paris.

Le corps, l’identificationAna Dussert

Le corps, l’identificationAna Dussert

La prochaine Journée de L’Envers de Paris, Fantasmes contemporains du corps, affirme dans son titre que le corps relève du fantasme, mettant les fantasmes au pluriel afin d’indiquer leurs manifestations multiples et donc relatives au discours contemporain, dans la mesure où celui-ci érige, à la place de l’Un, un multiple hétérogène. Essayons cependant de saisir ce qui pourrait s’écrire du corps lorsqu’il s’énonce dans le registre de l’Un, faisant valoir que le multiple déclaré ne peut pas s’y extraire : non pas le Un unifiant l’image, les images, mais le Un accédant à la structure.

À la fin de son enseignement, Lacan affirmait ceci : « LOM cahun corps et nan-na Kun [1] », faisant allusion à l’artiste transgenre Claude Cahun dont on pourrait justement questionner la division des corps selon la différence des sexes comme paradigme – la duplicité des corps en fonction de la sexuation : le corps féminin, le corps masculin. Or, la phrase de Lacan ne suit pas la ligne de partage des corps selon les caractères sexuels secondaires, mais pose d’emblée le corps dans le registre de l’Un. Quel qu’il soit le corps, ou quelles qu’elles soient les manifestations des corps, on n’en a qu’Un. Au-delà ou en-deçà des fantasmes, le concept qui y donne accès sera donc celui de l’identification, car le fait que le corps s’énonce dans le registre de l’avoir – l’homme n’en a qu’un –, ce n’est que pour mieux dire : « J’ai ça, c’est son seul être [2] ».

Quel est donc cet être qu’on a, et qu’on n’en a qu’un ? Afin d’en dessiner les contours, faisons un petit détour par le séminaire Problèmes cruciaux qui s’organise autour de la question de la séparation de l’idéal et de l’objet, à travers le premier des trois types de l’identification que Freud a abordés dans Massenpsychologie, l’identification au père [3]. Cette identification mystérieuse est liée à la phase orale de l’organisation libidinale et se résume à une assimilation par l’incorporation que Freud considère comme une dévoration de l’image de l’autre. Cependant, Lacan affirme qu’elle « interdit de céder à la tentation de faire de l’identification première une affaire de représentation, d’image ». Il s’agit, au contraire, d’une « forme de matérialisme radical, dont le support est, non pas le biologique, mais bien le corps [4] ». Ainsi, l’incorporation de l’Autre constitue un corps qui n’est pas le corps cartésien, projeté dans l’espace, mais se rapproche de l’objet comme reste – chu de l’Autre au moment même de son incorporation. Lacan l’aborde avec la bouteille de Klein qui est une extension paradoxale de ce corps non spéculaire : un objet qui se construit en collant ensemble deux bandes de Möbius et en faisant le tour autour de leur propre corps. Une espèce de bouteille, donc une surface close, dont le goulot s’introduit dans son corps et rejoint son propre fond. Voici donc ce « matérialisme radical » dont le support n’est pas le biologique, mais précisément le corps.

Donnant corps à la coupure signifiante, la bouteille de Klein subvertit la problématique du rapport à l’objet, car dans la privation primordiale de l’identification par l’incorporation, ne se manifeste pas un pur creux, mais un résidu que Lacan appelle l’objet petit a et qui « modifie, incline, infléchit, toute l’économie possible d’un rapport libidinal à l’objet, d’un choix quelconque qualifié d’objectal [5] ». Disons que l’identification primordiale au père constitue le corps libidinal, irréductible à l’image ainsi qu’à l’ordre symbolique. Alors quels qu’ils soient les fantasmes contemporains des corps, traversés par les expériences subjectives, toujours hétérogènes, la psychanalyse s’oriente d’un corps qui « Un-carne » le reste. De ce fait, le corps est transversal à ce qui s’établit comme rapport à l’objet : le rapport au monde, ainsi qu’à soi-même.

[1] Lacan J., « Joyce le symptôme » (1979), Autres écrits, Paris, Seuil, 2001, p. 565.
[2] Ibid.
[3] Cf. Freud S., Psychologie des foules et analyse du moi, Paris, Payot & Rivages, 2012, p. 67-75.
[4] Lacan J., Le Séminaire, livre XII, Problèmes cruciaux, texte établi par J.-A. Miller, Paris, Seuil & Le Champ Freudien, 2025, p. 177-178.
[5] Ibid., p. 187.

Édito mars 2025

Édito mars 2025

Édito février 2025

Cinzia Crosali,
Directrice de l’Envers de Paris

Chers membres et amis de L’Envers de Paris,

Le mois de mars revêt pour nous une grande importance, car c’est le moment de l’assemblée générale annuelle de notre association. Il s’agit d’une occasion précieuse pour se rencontrer, connaître les nouveaux inscrits, échanger, se confronter, lancer de nouveaux projets, passer un moment convivial autour d’un verre. Tous les membres de l’association y sont conviés et y sont attendus le 13 mars prochain, à l’adresse indiquée dans la convocation. Si un membre de L’Envers de Paris n’a pas reçu la convocation, merci d’écrire à : cinziacrosali@gmail.com

Mars est aussi le mois du printemps et de son réveil ; nous sommes sensibles à tous les types de réveils, car c’est le réveil qui nous oriente avec les effets du réel et ses irruptions. L’émergence du réel est précisément ce qui nous réveille, le réel affecte le corps et produit des tensions insupportables, dues au fait qu’on se cogne à l’impossible. Même s’il nous est impossible de nous réveiller complètement, nous pouvons néanmoins avoir un désir de réveil et énoncer avec Jacques-Alain Miller que cet impossible « n’interdit pas de le prendre pour fin, ce réveil 1 ». En tous cas, réveillés ou endormis, nous ne cessons pas de rêver, même avec les yeux ouverts. De quoi sont-ils faits ces rêves éveillés qui ont tellement intéressé Freud ? S’agit-il des pensées, des rêveries, des fantaisies, des fantasmes ? Et comment le corps y est-il impliqué ? C’est ce que nous continuons d’explorer à l’EdP, autour du notre thème de recherche, intitulé Fantasmes contemporains du corps, fil rouge qui nous accompagnera jusqu’à la fin de l’année.

Rêves et fantasmes sont aussi les deux signifiants que nous retrouvons dans le titre de la prochaine Journée de l’Institut Psychanalytique de l’Enfant, qui se tiendra le 22 mars prochain, de 9h à 18h au Palais des Congrès, 25 Avenue Victor Cresson, 92130 Issy-les-Moulineaux, sous le titre : Rêves et Fantasmes chez l’enfant.

Suivre ce lien pour en savoir plus.

Nous signalons enfin deux événements majeurs de notre champ, qui ont déjà mis au travail plusieurs membres de L’Envers de Paris : PIPOL 12 et les Journées de l’École de Cause freudienne.

Le prochain Congrès de l’EuroFédération de Psychanalyse, PIPOL 12 se tiendra les 12 et 13 juillet 2025 à Bruxelles, sous le titre : Malaise dans la Famille. 

Suivre ce lien pour en savoir plus.

Les 55es Journées de l’École de la Cause freudienne se dérouleront les 15 et 16 novembre 2025, au Palais des Congrès de Paris, sous le titre : Le Comique dans la clinique. Elles se tiendront uniquement en présence. Leur direction sera assurée par Laura Sokolowsky.

Nous vous invitons à participer nombreux à ces événements.

 

1. Miller J.-A., « Réveil », Ornicar ? n° 20-21, Paris, Lyse, été 1980, p. 52.  

Lire la suite

***

Suivons maintenant les informations sur l’activité des cartels et des vecteurs de l’EdP :


 

Cartels

« Y-aurait-il une possible analogie entre le Witz[1] et la structure même du cartel telle que Lacan l’a proposée ? Un cartel se structure autour d’un manque de savoir et le plus-un a la responsabilité de faire chuter de cette place tout ce qui viendrait la satisfaire trop vite et, par là même, de soutenir le désir de chacun à élaborer un savoir nouveau.[2] »

De la lecture de Freud à Lacan, Chloé Lefebvre nous donne un bout de savoir sur « Le Witz en cartel », à lire dans le dernier numéro de Cartello en suivant ce lien :

https://www.causefreudienne.org/newsletters/le-witz-en-cartel/

Contact Paris cartels : Stéphanie Lavigne

1. Freud S., Le Mot d’esprit et ses rapports avec l’inconscient, Paris, Gallimard, 1930.
2. Lefebvre C., « Le witz en cartel », Cartello n° 45, octobre 2024, publication en ligne.


 

Vecteur Lectures freudiennes

Nous continuons de lire et traduire l’article que Freud écrit en 1919 : « Ein Kind wird geschlagen – Un enfant est battu ». Dans ce paragraphe, l’examen du « matériel » masculin conduit Freud à se demander si une structure symétriquement inverse de celle présente dans le « matériel » féminin peut se retrouver. Tel n’est pas le cas : là où le fantasme de la deuxième phase est inconscient chez les femmes, il semble conscient chez les hommes. Citons le dans notre traduction : « Nous avons l’habitude, de promettre aux impuissants psychiques, qui se soumettent à notre traitement, un rétablissement positif, mais devrions aussi être plus prudents dans ce pronostic, aussi longtemps que la dynamique du trouble nous est inconnue. C’est une méchante surprise, lorsque l’analyse nous dévoile comme cause de l’impuissance “simplement psychique” une position exclusivement masochiste, peut-être enracinée depuis longtemps. Chez ces hommes masochistes on fait donc une découverte, qui nous avertit de ne pas poursuivre pour l’instant l’analogie avec les circonstances présentes chez la femme, mais de juger l’état des choses par lui-même ».

Nous nous retrouverons chez Susanne Hommel le jeudi 6 mars 2025 à 21h, contact :  lectures-freudiennes@enversdeparis.org

contact lectures-freudiennes@enversdeparis.org

 


 

Seminario Latino

Likes, reels, stories, selfies, IRL, skins… une pluralisation de signifiants liés aux réseaux sociaux se fait présente dans le discours contemporain et notre clinique en témoigne. Le smartphone, objet-gadget par excellence, interroge les nouvelles modalités de faire lien social. L’imaginaire prend le dessus sur l’ordre symbolique. Comme conséquence nous avons les multiples facettes de ce que dégage l’aliénation dans l’axe imaginaire, berceau de l’agressivité et de la rivalité : allant d’un pousse-au-narcissisme et construction d’un moi numérique à la montée de la haine promue par l’ère virtuelle. Les écrans du numérique peuvent-ils venir court-circuiter le voile structurant du fantasme ?

Exit Œdipe, place à Narcisse !

Lors de cette soirée qui aura lieu le mercredi 19 mars à 21h à la Maison de l’Amérique Latine en présence de Laurent Dupont, psychanalyste membre de l’ECF, nous explorerons les effets subjectifs de l’usage des écrans sur le rapport à l’image du corps et au narcissisme.

Nous vous attendons nombreux !

Contact : seminario-latino-de-paris@enversdeparis.org

Vous pouvez consulter l’argument du cycle d’étude 2024-2025 du Seminario Latino de Paris sur : enversdeparis.org/seminario-latino-de-paris


 

Vecteur Lectures cliniques

La seconde année du cycle 2023-2025 sur « La clinique différentielle » s’est ouverte en octobre pour une année scolaire. Durant cette période, le vecteur se réunira cinq fois, chaque fois en présence d’un invité extime. Nous avons déjà reçu Adela Bande-Alcantud, Ricardo Schabelman et Ariane Chottin. Au mois de mars, nous recevrons Cinzia Crosali, psychanalyste membre de l’ECF.  Nous aurons l’occasion de prendre la parole, de présenter un exposé et d’en débattre à plusieurs. Pour que chacun puisse présenter son travail, le nombre de participants est limité. La commission d’organisation du vecteur est composée de : Andréa Castillo, Noa Farchi, Caroline Happiette, Pauline Préau et Sophie Ronsin.

Responsables : Caroline Happiette, Sophie Ronsin
Contact : vlc.enversdeparis@gmail.com

 


 

Vecteur Psychanalyse et littérature

R. Barthes soutient dans Le plaisir du texte, que la littérature n’est pas un simple divertissement et qu’elle ancre son fondement dans une jouissance qui ne peut pas s’écrire. Pour rendre compte de cette jouissance du langage, il se réfère au processus d’écriture de Sade dans lequel il dégage la fonction de la coupure entre deux usages du langage. Au bon usage du langage dans « son état canonique, tel qu’il a été fixé par l’école, […], la littérature, la culture[1] », un usage subversif vient y faire coupure. L’écriture littéraire vise ces deux usages « sage » et « mobile[2] » du langage et les met en scène. Chaque écrivain a sa manière propre d’user et de mettre en scène cette coupure lui assurant un compromis symptomatique entre, d’un côté, l’Autre du discours commun où s’exerce le plaisir du texte et, de l’autre côté, la faille subversive de l’Autre où se manifeste une jouissance hors sens, mais créatrice d’un sens nouveau. Pour Chantal Thomas, R. Barthes, dont elle a suivi les séminaires, est une référence lui ouvrant la voie de la mise en jeu de son « corps érotique[3] » dans sa modalité d’écriture. À partir d’une courte nouvelle de son choix tirée de La vie réelle des petites filles, chaque vecteurisant, lors de notre prochaine réunion de mars, exposera comment Chantal Thomas coupe son texte de plaisir avec une jouissance scandaleuse et productrice d’« un terme excentrique, inouï[4] ».

Notre prochaine réunion aura lieu par Zoom, le 3 mars à 20h

Responsable : Marie-Christine Baillehache.
Contact : litterature@enversdeparis.org


1.Roland Barthes, Le plaisir du texte, Paris, Seuil, 1973, p. 13.
2. Ibid.
3. Ibid., p. 26.
4. Ibid., p. 74.

 


 

Vecteur Le corps, pas sans la psychanalyse

Lors de notre rencontre de février, nous avons analysé le dernier défilé de mode de Julien Fournié, « First Circus », auquel les membres de notre vecteur étaient invités. Des fantasmes du corps s’y laissent deviner : fantasmes bien connus du corps androgyne ou du corps militaire, fantasme christique que le corps du créateur lui-même vient à incarner… Mais le défilé indique aussi un au-delà du fantasme à travers la mise-en-scène d’un certain chaos d’images et de sons qui renvoie au corps réel jouissant, celui que les vêtements recouvrent tout en y renvoyant. Comme d’autres productions contemporaines du luxe, du commerce ou de l’art, ce défilé manifeste l’ambition d’embrasser le corps du public tout entier, par tous les sens à la fois, à la manière de ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler « une expérience totale » – pour reprendre les signifiants en vogue par lesquels ce fantasme se dit souvent.

Prochaine rencontre : le 11 mars à 20h30 au 76 rue des Saints-Pères.

Membres du vecteur : Geneviève Mordant, Pierre-Yves Turpin, Guido Reyna, Martine Bottin, Isabelle Lebihan, Marie Faucher-Desjardins, ElisabettaMilan Fournier, Ana Dussert, Baptiste Jacomino (coordinateur).

Responsable : Baptiste Jacomino

Contact : corpsy@enversdeparis.org

 


 

Vecteur Psynéma

La prochaine projection suivie d’un débat organisé par le vecteur Psynéma aura lieu, le jeudi 27 mars 2025 à 20h00, au cinéma Les 7 Parnassiens (Paris 14e – métro Vavin).

En hommage au grand cinéaste David Lynch récemment disparu, nous avons choisi de vous présenter LOST HIGHWAY (1997) qui fait écho au thème, Fantasmes contemporains du corps, de la prochaine Journée de L’Envers de Paris et de l’ACF-IdF. Dans ce film, structuré comme une bande de Moebius où imaginaire et réel se rejoignent, D. Lynch décline ses thèmes favoris, axés, outre l’objet regard, sur l’objet voix qui est au cœur de son œuvre.

Nous reprendrons ces différents points lors de notre réunion de travail fixée le mercredi 26 février à 20h30..

Contact : vecteur.psynema@gmail.com

Responsables du vecteur : Marie Majour et Leïla Touati.


Réservation :  www.multicine.fr


 

Vecteur Théâtre

La prochaine rencontre du vecteur Théâtre et psychanalyse aura lieu dimanche 13 avril à 15h, aux ateliers Berthier de l’Odéon, autour de L’Amante anglaise, de Marguerite Duras. Francesca Biagi Chai a accepté notre invitation à venir débattre avec la metteuse en scène, Emilie Charriot et c’est Eva Carrere Naranjo qui animera la rencontre.

Contact : theatreetpsychanalyse@gmail.com.

 


 

Vecteur Clinique et addictions

La prochaine Conversation Clinique & Addictions aura lieu le mercredi 5 mars 2025. Mathilde Braun interviendra sous le titre : « Vivre ou mourir ».

Vivre ou mourir, telle est sa question. La consommation de substance psychoactive protège ce jeune sujet du pire, mais l’oblige à un entre-deux invivable pour lui et insupportable pour ses proches.
Nous verrons quels effets et écueils le commencement d’une cure par la parole produit sur le sujet qui, jusque-là, avait choisi de se taire.

Renseignements et inscriptions sur addictia.org/conversations


 

***

Le dernier numéro de notre bulletin, Horizon 69, est disponible à la librairie de l’ECF.

Pour l’achat on-line: https://www.ecf-echoppe.com/produit/dans-la-jungle-du-numerique/

 


 

Nous vous attendons nombreux aux rendez-vous et aux événements de ce mois à L’Envers de Paris et à l’École de la Cause freudienne.

Cinzia Crosali

Directrice de L’Envers de Paris

 

Quelques associations libres sur le thème « Fantasmes contemporains du corps »

Quelques associations libres sur le thème « Fantasmes contemporains du corps »

Quelques associations libres sur le thème
« Fantasmes contemporains du corps[1] »

Grigory Arkhipov

 

Il convient de cerner ces trois termes : 1) fantasme ; 2) contemporanéité ; 3) corps.

On trouve les repères du fantasme dans le texte de J.-A. Miller : « le fantasme comme rêverie, le fantasme comme moyen de jouissance […] et “le fantasme dit fondamental, [qui] donne son cadre à toute la vie mentale du sujet[2]” ».

La contemporanéité, avec la notion d’hypermodernité, nous semble opportune ; le préfixe hyper- (qui désigne « le trop, l’excès[3] ») fait surgir la dimension surmoïque propre à notre époque. Les impératifs néolibéraux se concrétisent sous la forme des superhéros dont les corps revêtent cet aspect du trop – voir The Boys, série satyrique qui met l’envers jouissif (la gourmandise du surmoi) de ces déités à nu.

L’excès de la chair hypermoderne habite le body horror. La protagoniste du film La Substance est remake du Dr Faust et de Dorian Gray. Pour contrer le vieillissement, elle s’adresse à un laboratoire qui lui garantit la jeunesse éternelle, mais à quelques conditions… Ce drame caustique met en scène un corps féminin hypersexualisé dont le revers nauséabond est une substance informe qui insiste malgré, ou plutôt grâce à toutes les techniques scientifiques.

La science, maintenant. Dans son livre La Science de la résurrection[4], S. Charpier aborde une question qui évoque celle que Lacan a posée dans son séminaire sur Joyce (« à partir de quand est-on fou ?[5] ») : à partir de quand est-on mort ? Les soins intensifs qui permettent de sauver un patient, créent des dilemmes éthiques qui augmentent l’espace de l’entre-deux morts. La mort cérébrale produit un être plongé dans une jouissance qui semble végétative. Comment penser l’existence d’un corps rejeté hors du fantasme, mais qui peut néanmoins mûrir, se reproduire et même réagir aux mots ? De nombreux films essayent de répondre à cette question, thrillers ou films d’auteurs comme Almodóvar avec Habla con ella (2002).

Parlant de la mort, nous ne pouvons pas ignorer la guerre qui a éclaté sur notre continent en 2022. La guerre a toujours été un moteur du progrès. Les exploits d’une agence du Département de la Défense des États-Unis (DARPA) dans le domaine de la bionique font exister des corps qui pulvérisent le cadre des théories évolutionnistes classiques. Ce nouveau corps dit augmenté est paradoxal en ce qu’il naît d’un corps mutilé. Un cyber-objet serait susceptible de remplacer une livre de chair perdue ?

Nous ne pouvons pas négliger la question de l’espace : ce qui relevait auparavant du domaine de l’État est désormais transféré à la propriété privée. Le tourisme cosmique devenant de plus en plus accessible nous confronte à un corps plongé dans l’espace kantien reconstruit dans la navette.

Pour aborder le corps, les trois registres : symbolique, imaginaire et réel permettent un repérage fécond.

Le corps symbolique est un « monument[6] » marqué par des stigmates, scarifications et tatouages en constante augmentation. Le corps lui-même et sa jouissance peuvent faire l’objet d’un pacte symbolique. Ainsi, le rôle des contrats dans les pratiques BDSM consiste à encadrer des pratiques perverses.

Le corps imaginaire nous renvoie aux images embellies à l’aide des filtres superposés qui abondent sur les réseaux sociaux. Selon une récente étude de l’IFOP, de plus en plus de Français (surtout des jeunes) déclarent ne pas avoir de rapports sexuels[7]. En dehors des changement sociétaux qui entraînent une diminution du commerce charnel, tandis qu’un tiers du trafic sur le web mondial serait lié à la pornographie. De quoi témoignent ces flots d’images corporelles obscènes ?

C’est le corps réel qui nous renvoie au problème du fantasme fondamental, qui ne peut se construire que dans l’analyse.

En effet, si la pandémie a favorisé le travail psy en visio, rien ne remplace la présence des corps, celui du patient et celui de l’analyste. Ce point est constamment remis sur le métier.

 


[1] Ce texte est en partie le produit d’un travail de cartel.
[2] Miller J-A., « Propos sur La Logique du fantasme », La Cause du désir, n° 114, juillet 2023. p. 69
[3] Aubert N., « L’individu hypermoderne et ses pathologies », L’information psychiatrique, vol. 82, n° 7, 09/2006, p. 606
[4] Charpier S., La Science de la résurrection. Ils ont repoussé les frontières de la mort, Flammarion, 2020.
[5] Lacan J., Le Séminaire, livre XXIII, Le Sinthome (1975-76), Paris, Seuil, 2005, p. 77
[6] Lacan J., « Fonction et champ de la parole et du langage en psychanalyse », dans Écrits, Paris, Seuil, 1966, p. 259
[7] Duffaut M., « Sexualité post-MeToo : les Français font de moins en moins l’amour, mais “ mieux ” », France Inter, 06/02/2024. (https://www.radiofrance.fr/franceinter/sexualite-post-metoo-les-francais-font-de-moins-en-moins-l-amour-mais-mieux-2473860).